Nouvelle réglementation sur le travail en hauteur : Un système d’arrêt de chute ne devrait jamais servir à maintenir un travailleur en position de travail

La récente modification réglementaire du Code de sécurité des travaux de construction apporte de nouvelles exigences en matière de protection contre les chutes. Parmi celles-ci, l’article 2.9.2 stipule que :

“Lorsque le travailleur ne peut se maintenir en place sans l’aide de sa liaison d’arrêt de chute, un moyen de positionnement, tel un madrier sur équerres, une longe ou une courroie de positionnement, une corde de suspension ou une plateforme, doit être utilisé.”

Cette exigence pourrait sembler logique à première vue, mais elle va à l’encontre des principes fondamentaux de l’utilisation d’un système d’arrêt de chute et des recommandations des fabricants.

La phrase du règlement :
“Lorsque le travailleur ne peut se maintenir en place sans l’aide de sa liaison d’arrêt de chute, un moyen de positionnement […] doit être utilisé.”

présente un problème sémantique en raison d’une double négation qui rend son interprétation ambiguë.

Problème principal : une mauvaise interprétation possible

Plutôt que d’interdire clairement l’usage d’un dispositif antichute pour le maintien en position, la phrase impose simplement un moyen de positionnement supplémentaire si le travailleur ne peut pas se maintenir autrement. Cela signifie qu’un travailleur pourrait se maintenir uniquement avec son dispositif antichute s’il considère qu’il peut le faire sans être explicitement en infraction.

👉 Un système d’arrêt de chute ne doit jamais être utilisé pour se maintenir en place !


Une sollicitation répétitive qui compromet la sécurité

Un système d’arrêt de chute est conçu pour stopper une chute, pas pour supporter un travailleur en continu. En appliquant régulièrement du poids ou de la tension sur ce système :

Les indicateurs de chute du dispositif d’arrêt de chute ou du harnais risquent de se déclencher prématurément, rendant l’équipement inutilisable même sans véritable chute.

Les composants de l’équipement subissent une usure anormale, ce qui peut affecter leur efficacité en cas de besoin réel.

Cela crée une fausse perception de sécurité : un travailleur pourrait croire qu’il est correctement protégé, alors qu’en réalité, son équipement a été fragilisé par une utilisation inappropriée.

Manque de stabilité : le travailleur risque de perdre le contrôle de sa posture, de s’exposer à une chute pendulaire et de se retrouver suspendu dans son harnais en cas de glissade.


Ce que disent les bonnes pratiques

Selon les directives élémentaires des fabricants et les normes de l’industrie (CSA), un travailleur qui doit travailler avec les mains libres doit :

✔️ Utiliser un système de positionnement primaire (longe de positionnement, corde de suspension, plateforme, etc.).
✔️ Avoir un système d’arrêt de chute secondaire en place en cas de défaillance du positionnement.
✔️ Ne jamais dépendre de son système d’arrêt de chute pour se stabiliser en continu.

L’objectif est que le travailleur puisse contrôler sa position activement sans dépendre du système d’arrêt de chute.

L’article 2.9.2 semble donc introduire une ambiguïté qui risque de créer de la confusion entre les intervenants quant à son interprétation. Peut-être aurait-il pu être rédigé selon ce qui suit:

“Lorsque le travailleur doit avoir les mains libres dans sa position de travail, il doit utiliser un moyen de positionnement, tel un madrier sur équerres, une longe ou une courroie de positionnement, une corde de suspension ou une plateforme, en plus de sa liaison d’arrêt de chute. Un système d’arrêt de chute n’est pas un moyen de positionnement.”


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