Projet de modification réglementaire sur le travail en hauteur : Une réforme essentielle pour la sécurité et la cohérence

Le gouvernement du Québec a entrepris une modernisation de sa réglementation sur le travail en hauteur. Ce projet de modification réglementaire s’inscrit dans la volonté d’actualiser le Code de sécurité pour les travaux de construction (CSTC) et poursuit trois objectifs majeurs, tels que présentés dans le sommaire exécutif du projet :
- Clarifier et renforcer les exigences de protection contre les chutes afin d’assurer une meilleure application des mesures de prévention sur les chantiers de construction et autres milieux concernés.
- Imposer des mesures de sauvetage obligatoires pour assurer un dégagement rapide et efficace d’un travailleur suspendu à la suite d’une chute.
- Harmoniser la réglementation québécoise avec celle des autres provinces canadiennes, notamment l’Ontario, afin de faciliter la mobilité de la main-d’œuvre et d’assurer une meilleure cohérence avec les partenaires économiques du Québec.
Cette révision réglementaire adopte une approche proactive en matière de prévention des chutes. Elle vise à uniformiser les pratiques et à améliorer les standards de sécurité pour l’ensemble des travailleurs québécois.
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Éliminer les incohérences pour assurer une application claire et efficace
Bien que cette réforme constitue une avancée significative, certains articles du projet de modification réglementaire présentent des incohérences susceptibles de créer des ambiguïtés pour les intervenants du milieu.
🔹 Confusion dans l’utilisation d’un dispositif de positionnement
Un exemple concret d’incohérence concerne l’exigence d’un système de positionnement.
📌 L’article actuel stipule :
“Lorsque le travailleur ne peut se maintenir en place sans l’aide de sa liaison d’arrêt de chute, un moyen de positionnement, tel un madrier sur équerres, une longe ou une courroie de positionnement, une corde de suspension ou une plateforme, doit être utilisé.”
❌ Pourquoi cet article est-il problématique ?
- Un système d’arrêt de chute n’est pas un moyen de positionnement. Un système d’arrêt de chute (coulisseau, absorbeur ou enrouleur-dérouleur) est conçu uniquement pour arrêter une chute en cas de défaillance d’un autre moyen de maintien en position et ne doit jamais être utilisé comme principal moyen de positionnement. ⛔
- Interprétation erronée de l’article : Dans sa formulation actuelle, l’article pourrait laisser entendre qu’un travailleur peut se maintenir en position à l’aide de son système d’arrêt de chute.
- Non-respect des directives des fabricants : Cette pratique va à l’encontre des directives des fabricants et pourrait endommager les indicateurs de chute des dispositifs ou du harnais. ️
- Risque pour la sécurité des travailleurs : Cette confusion pourrait entraîner une mauvaise application des mesures de sécurité, mettant ainsi en péril la protection des travailleurs.
Analyse et validation
Problème potentiel de compréhension ⚠️
L’expression “sans l’aide de sa liaison d’arrêt de chute” peut être mal interprétée. Le système d’arrêt de chute sert à arrêter une chute et non à maintenir un travailleur en position. Il faut éviter toute ambiguïté entre
système d’arrêt de chute et moyens de positionnement.
✅ Proposition de reformulation :
“Lorsque le travailleur doit avoir les mains libres dans sa position de travail, il doit utiliser un moyen de positionnement, tel un madrier sur équerres, une longe ou une courroie de positionnement, une corde de suspension ou une plateforme, en plus de sa liaison d’arrêt de chute. Un système d’arrêt de chute n’est pas un moyen de positionnement.”
🔹 Incohérence dans la terminologie utilisée pour la liaison d’arrêt de chute dans un système de retenue
📌 L’article actuel stipule :
“2.10.16. Système de limitation de déplacement : Un système de limitation de déplacement doit comprendre :
1° Un harnais de sécurité conforme à l’article 2.10.12 ou une ceinture de sécurité conforme à l’article 2.10.14 ;
2° Une liaison d’arrêt de chute sans absorbeur d’énergie dont la longueur ne permet pas de s’approcher à moins de 0,9 m de la bordure du vide et conforme à l’article 2.10.12.”*
❌ Pourquoi cette modification est-elle problématique ?
- Confusion sur la nature du dispositif : Une liaison d’arrêt de chute est conçue pour arrêter une chute, pas pour empêcher un déplacement.
- Non-conformité avec l’objectif du système de limitation de déplacement : Ce système vise à empêcher la chute, alors qu’une liaison d’arrêt de chute n’est pas conçue pour cela.
- Incohérence avec les pratiques des fabricants : Une liaison de limitation de déplacement serait plus précise et conforme aux objectifs du système. ⚙️
Justification de la nécessité d’une liaison de limitation de déplacement :
💡 Bien qu’une liaison d’arrêt de chute puisse être utilisée dans un système de retenue, cela n’est possible que si le fabricant l’autorise, comme c’est le cas pour certains coulisseaux. Cette distinction justifie qu’il est préférable d’utiliser l’expression « liaison de limitation de déplacement », qui reflète plus fidèlement la fonction réelle du dispositif dans ce contexte.
✅ Proposition de reformulation de l’article 2.10.16 :
“Un système de limitation de déplacement doit comprendre :
1° Un harnais de sécurité conforme à l’article 2.10.12 ;
2° Une liaison de limitation de déplacement dont la longueur empêche le travailleur de s’approcher à moins de 0,9 m du bord du vide, cette distance étant mesurée à partir de l’anneau dorsal du harnais. Cette liaison doit être conforme à l’article 2.10.12, mais n’a pas l’obligation d’être munie d’un absorbeur d’énergie.”*
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🔹 Alignement des exigences de formation pour le travail en hauteur
L’Ontario et Terre-Neuve ne sont pas les seules provinces à avoir renforcé leur réglementation en matière de formation.
Le Québec lui-même a récemment modernisé la formation sur les engins élévateurs (octobre 2024) en imposant :
- Une formation conforme à la norme CSA.
- Une formation pratique minimale d’une heure par type d’équipement.
- Une évaluation rigoureuse des connaissances et des compétences.
Cependant, les travailleurs exécutant des tâches en hauteur sur des échafaudages, des toitures ou d’autres structures ne sont pas soumis aux mêmes exigences, bien que les risques soient similaires.
❌ Pourquoi cette distinction est-elle incohérente ?
- Encadrement disparate : L’encadrement strict pour les engins élévateurs contraste avec l’absence d’exigences rigoureuses pour les autres formes de travail en hauteur. ⚖️
- Confusion chez les employeurs et travailleurs : Cela pourrait laisser place à des interprétations divergentes quant aux obligations de formation. ❓
✅ Recommandation :
L’alignement des exigences de formation pour le travail en hauteur avec celles des engins élévateurs permettrait d’assurer une application uniforme et cohérente des mesures de prévention.
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Nos recommandations ont été transmises au comité responsable
Notre équipe a soumis ces commentaires au comité en charge de cette réforme. Nous encourageons l’intégration de ces recommandations afin d’assurer une mise en œuvre efficace et sécuritaire.
Nous espérons que ces recommandations seront prises en compte dans la version finale de la réglementation afin d’assurer une mise en œuvre fluide et compréhensible pour l’ensemble des intervenants du secteur.
L’amélioration de la réglementation sur le travail en hauteur est essentielle pour protéger les travailleurs et renforcer la cohérence des pratiques en matière de sécurité.
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